En 2005, W. Chan Kim et Renée Mauborgne, deux chercheurs de l’INSEAD publient Stratégie Océan Bleu. Leur théorie est que le plus puissant levier de croissance d’une entreprise n’est pas dans l’innovation technique mais dans sa capacité à sortir du paradigme de la lutte avec ses concurrents.

En effet, le combat sur l’amélioration de ses produits et la réduction des coût se joue souvent pied à pied sans réel marqueur différenciant entre les opposants. À l’inverse, en trouvant de nouveaux espaces stratégiques l’entreprise s’ouvre à de nouvelles demandes et à de nouveaux clients et crée un nouveau marché où la compétition est plus faible et surtout à notre avantage.

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L’exemple le plus connu d’application de cette stratégie est celui de Nintendo dont la console Wii était techniquement moins performante que ses concurrentes Playstation et Xbox mais dont les jeux et les accessoires ont attirés une nouvelle clientèle de Casual gamer.

L’une des forces de cette stratégie est qu’elle rejoint les méthodologies dudesign thinking qui cherchent à étudier le sens des choses pour mieux répondre aux attentes des utilisateurs. Cependant, elle a de nombreuse limite notamment en ce qu’elle ne se concentre uniquement sur la proposition de valeur et pas sur toutes les dimensions possibles d’un business model.

« Le terme de business model est aujourd’hui presque galvaudé, et chacun en a sa propre définition »

Ce constat a été posé en 2015 par Hélène Musikas dans la présentation de la méthode Odyssey 3.14 et traduit l’essentiel de la méthode qu’elle a co-créée avec deux autres professeurs d’HEC.

Dans cette méthode l’objectif est d’analyser l’ensemble des composantes d’un business model. Tout d’abord, la proposition de valeur : quels produits et services sont proposés par l’entreprise. Ensuite, l’architecture de valeur : quelles sont les ressources et les moyens utilisés pour parvenir à produire. Enfin l’équation de profit qui est la traduction financière des points précédents. Ces trois composantes principales sont divisées en 14 directions d’études ce qui permet d’analyser et d’innover dans toutes les dimensions dubusiness model.

Cette méthode est efficace en ce qu’elle permet de n’oublier aucun aspect de la création de valeur d’une entreprise. Cependant, son côté très mécanique est à mon avis un vrai frein à la créativité. De plus, elle ne présente pas réellement de définition du business model.

Ce même constat d’absence de définition claire de ce qu’est un business model avait déjà été émis en 2010 par les économistes Alexander Osterwalder et Yves Pigneur en incipit de leur ouvrage Business Model Génération. Leur réflexion essaye d’y répondre par la création d’un outil permettant de décrire simplement son business model : le Business Model Canvas.

S’il ne s’agit pas en soit d’un outil de stratégie, le BMC permet de poser la proposition de valeur de l’entreprise et d’étudier comment l’optimiser.

À partir de cet outil il existe quatre manières principales de faire évoluer sonbusiness model. La première est de partir des ressources en regardant les infrastructures et les partenariats possibles. La deuxième est de partir de l’offre en créant de nouvelles propositions de valeurs. La troisième est de partir du client et de ses besoins, en facilitant son accès au produit ou en réduisant ses pain points. La dernière est de partir de la finance en cherchant de nouvelles sources de revenus, d’autres mécanismes de pricing ou en réduisant les coûts de structure.

Cette définition du business model peut-être cumulée avec la méthode Six Sigma créée en 1986 au sein des équipes de Motorola. L’objectif de Six Sigma est de réduire l’écart type entre ce qui est et ce qui devrait être. Si à l’origine cette méthode était plus destinée à l’amélioration de la qualité de production elle est aujourd’hui de plus en plus utilisée pour travailler l’ensemble du business model et de la proposition de valeur de l’entreprise. Cela se traduit d’ailleurs par l’apparition de nouvelles variations de la méthode comme le Lean Six Sigma ou le Design for Six Sigma.

Une méthode plus complète pour faire évoluer son business model est celle du diamant de l’innovation totale créée par Marc Giguet. En plus des trois dimensions classiques d’innovation que sont la R&D, la production et l’analyse du marché, cette méthode ajoute la dimension humaine et la dimension financière aux ressources fondamentales de l’entreprise. Ces cinq directions permettent de créer dix axes à explorer où pour chacun il faut évaluer les coûts, risques et perspectives. L’innovation n’est alors plus systématiquement synonymes de technologie mais aussi le fruit de la connaissance de l’ensemble de son entreprise.

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Devant la multitude des méthodes existantes la question que l’on peut se poser est celle du choix.

La meilleure réponse est probablement que cela dépend de l’état d’avancement du projet et des idées portées par l’entreprise. Si elle en est à l’analyse du comportement client et des problèmes qu’elle rencontre, les démarches d’Open Innovation et de Design thinking de méthodologie comme Océan bleu sont probablement les plus adaptées. Si elle en est déjà dans la mise en place de solutions alors les méthodes Agile et Lean sont les plus appropriées. Si elle travaille à l’optimisation du business model de son projet et à la scalabilité de celui-ci alors peuvent intervenir des méthodes comme le BMC combinées au diamant de l’innovation.