Cette réflexion se retrouve très souvent au coeur des débats animant le quotidien de notre école. Et pour cause, parmi la prolifération d’innovation qui nous submerge, rares sont les innovations en matière de monétisation de service.

Un ami designer appuyait récemment le point suivant: un service répondant à un réel besoin utilisateur finira par trouver son marché. Je lui opposais des exemples de services bâtis sur un modèle où l’utilisateur et son expérience étaient réellement les clefs du succès. Le constat est amer:

  • Tinder, l’application aux 2 milliards de matchs ( et 12 millions par jour) commence à se monétiser, avec l’apparition de fonctions payantes.
  • Instagram, 300 millions d’utilisateurs actifs mensuels en 2014, a franchi le pas en intégrant une régie publicitaire – celle de facebook – à sa plateforme. La société vise enfin la rentabilité.
  • Twitter, 288 millions d’utilisateurs actifs mensuels en 2014, peine à monétiser son audience. Bien qu’elle continue à réduire ses pertes d’années en années avec un revenu pour 1000 impressions de 2,73$ par utilisateurs, l’entreprise court toujours derrière la rentabilité.

Parmi la prolifération d’applications et de services web innovants que nous voyons naître chaque jour, rares sont les innovations en terme de modèles économiques (business model). Et malgré le succès public confirmé de la plupart d’entre eux, le moment de monétiser l’audience reste toujours délicat.

Au fil de la discussion, nous nous sommes amenés à nous poser la question de la publicité. En effet, on constate que quel que soit l’inventivité et la pertinence de la réponse à un besoin utilisateur réel, le service se retrouve toujours à un moment ou à un autre à envisager (si ce n’est à mettre en place) un modèle basé sur de la publicité.

Des contre exemples qui laissent espérer

Linkedin : En 2013, Linkedin a réussi a générer pas moins de 16,4$ en moyenne par utilisateur par heure passsée sur son site, contre 0,7$ pour Facebook et 0,3$ pour twitter. N’ayant jamais compté sur la publicité (présente néanmoins) pour parfaire son succès, le réseau social est passé d’un modèle économique reposant principalement sur l’abonnement premium (permettant notamment aux recruteurs de diffuser massivement leurs offres d’emploi) à un revenu généré en grande majorité (60% selon Lesechos) par l’Economic graph, la technologie permettant de modéliser les relations de dizaines de millions d’actifs dans le monde.

Au loin, au delà d’un monde de la presse qui penne à se réinventer face à la chute des revenus publicitaires et des ventes papier, quelques lueurs se distinguent. Parmi elles, Blendle, start up néerlandaise, propose aux internautes d’acheter les articles quelques centimes à l’unité, et surtout de se faire rembourser si l’article ne convient pas. Un modèle loin d’être parfait (en effet, on peut se faire rembourser même si l’article nous a plu), mais qui laisse envisager un avenir à un modèle quasiment condamné par l’avènement des ad-blockers.

Citons aussi Pay per laugh : l’exemple de la compagnie de théâtre espagnole qui fait payer au rire !

Un modèle économique ne tombe pas du ciel

Un service peut bien entendu connaître un franc succès sans générer de revenus. Pour autant, il est difficile de lever des fonds sur la seule base d’un service qui plaît aux utilisateurs. De plus, lorsque vous avez habitué vos utilisateurs à un service gratuit et sans pub, il est d’autant plus difficile de faire passer la pilule après coup.

Même si la publicité demeure très souvent une solution viable (même si loin d’être parfaite), on voit de plus en plus d’innovations jusque dans la manière de transformer un utilisateur gratuit en client.

Pour un service web qui se doit d’atteindre une masse critique d’utilisateurs le plus rapidement possible, monétiser son audience peut apparaître comme secondaire. Pour autant, la question se posera tôt ou tard. Et quand vient l’heure des choix, mieux vaut s’être déjà posé la question.

Et même si la publicité est souvent, si ce n’est à la base du business model une des composantes de ce dernier, il est difficile mais pas impossible d’innover également dans la manière de récolter la tune.

 

Références :